Atelier 5 - 2021 - sujet 2
Les malheurs des chaussons :
Le réveil vient de jouer sa petite musique, heureusement elle est douce et dansante à la fois, ça me donne envie de sortir du lit malgré une légère migraine après cette soirée d’anniversaire.
Je pose mes pieds sur la descente de lit, il fait très froid dans la chambre, quelle passoire cette maison ! Je prends vite ma veste de laine et j’enfile mes chaussettes car après le petit tapis c’est le carrelage, alors vite mes chaussons !
Je les attrape et ils résistent…ils restent collés au sol…je rêve ou quoi ? Ils ont un petit museau de chat sur le dessus et voilà que leurs petites gueules s’ouvrent et avec une voix un peu miaulant ils me disent :
« Bonjour Clafoutine ! bien dormi !
Regarde un peu… la chatte attend que tu te réveilles, ça fait 2 heures qu’elle nous tourne autour.
C’est comme ça tous les matins et nous commençons à en avoir marre.
Nous aussi on aimerait bien dormir, vu que tu te lèves toutes les nuits pour aller boire etc., on n’a pas assez de répit. »
Je m’assois sur le lit éberluée, je les regarde, ils se sont déplacés au bout du tapis. Ils poursuivent :
« Nous aimerions bien que tu mettes bien tes pieds dans les chaussants que nous sommes sans écraser à chaque fois nos oreilles. Nous ne sommes pas de vulgaires charentaises ! »
C’est alors que la chatte s’approche des chaussons et dit :
« Tout doux les pantoufles, vous prenez des grands airs, mais vous n’êtes jamais que de pales imitation de mon joli museau ! »
« Hé toi, la chatte, douillette des patins, va dormir sur le radiateur, ou chasser les souris au sous-sol. »
Je continue à me tétaniser des pieds à la tête car : où j’ai un accès de folie ou le monde est en train de chavirer dans un sans queue ni tête qui nous sera fatal !
Et les chaussons de me fixer avec leurs yeux ronds, noirs et de continuer leurs doléances :
« Et aussi ! Quand tu vas dans le jardin le matin et que c’est mouillé, que tu oublies de mettre tes sabots, nous on revient sales et en plus tu nous cries après, nous traitant de maudits, alors que c’est ton étourderie qui est responsable de nos salissures.
Alors tu nous brutalises en nous brossant, en nous séchant….
Et rappelle-toi quand tu as renversé le thé sur l’un et ta tartine de confiture sur l’autre nous avons eu droit à un tour dans un filet « pour linge délicat » dans la machine à laver mais nous avons bien cru en sortir en charpie ! Merci pour l’essorage ! Nous avons eu les semelles dans le chaussant, avons perdu presque tout notre fourrage intérieur, les oreilles presque arrachées, en avons encore le tournis.
Quand tu nous as rechaussés pour la première fois, avons eu l’impression de faire du tourniquet même en marche normale. Ç’est un traumatisme ça ! de la maltraitance !
C’est dur de passer l’hiver avec toi. Dans la maison tu ne nous ménages guère, tu croises tes pieds et étouffes l’un ou l’autre de nous sans vergogne, tu nous balances sous un meuble ou à côté des bottines crasseuses de pluie quand tu as besoin de sortir pour la énième fois, car il faut aller récupérer le linge sur le fil, faire sortir la chienne dans le terrain et que tu nous troques en grognant contre tes sabots (car il arrive que tu y penses !)
Nous avons l’impression de t’agacer par ce que nous ne sommes pas polyvalents.
Evidemment nous ne sommes pas tes chaussures de trail, les sportives prétentieuses, ni les souliers de ville qui sont lustrés et invités à assortir des tenues élégantes.
Nous, on a droit, au pyjama, au jogging d’intérieur, aux habits dépareillés, nous ne sommes assortis à rien ! Et pourtant si tu nous regardais mieux tu verrais comme nous sommes adorables, c’est bien pour ça que tu nous avais choisis, toi qui aimes les chats, mais l’habitude a rendu notre charme invisible. Les autres chaussants sont plus occasionnels donc chouchoutés.
De plus tu les admires en les sortant de leurs boites car depuis les confinements, tu es privée de beaucoup de fêtes etc. donc nous sommes beaucoup plus souvent à tes pieds et c’est l’hiver !
Heureusement notre saison est bientôt passée et nous allons rejoindre notre boite à « dormance estivale »…les nu pieds d’intérieur vont ressortir…essaie de les ménager, eux, tous n’ont pas notre résistance. Voilà il fallait que ce soit dit ! »
Et voici que mes « chaussons greffiers » se détournent de moi et côte à côte sagement se rangent tète bèche va savoir pourquoi ? Ils font la paire ces deux-là ! Silence absolu s’ensuit.
Je bouge mes orteils nus, mes mains doucement comme si j’avais peur de les casser, je respire ? Oui, mon cœur bat ? Oui,
Je suis vivante, la chatte dort, tout va bien.
Est-ce que c’est possible ce que je viens de vivre, d’entendre ? Ai-je fait un voyage dans une troisième dimension ? Ou une cinquième ? Je ne rêvais pas donc le monde des animaux et objets parlants existe.
On peut conclure « Je PARLE donc je SUIS ! » - après tout, c’est peut-être le monde d’après ?
Clohe
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