Atelier 5 - 2020 - Sujet 1 et 3
La détresse du père
- Pourquoi un destin si cruel ?
Se désespérait le père de la jeune Elsa. Mais nul ne pouvait l’entendre hormis sa petite fille et son ami le pêcheur L’enfant qui adorait son père ne cessait de se lamenter. Son ami le pêcheur lui dit :
- La vie n’est pas un chemin facile, mais si tu te concentres sur ce que tu aimes et qui est à ta disposition, tu seras une personne heureuse.
- Mais comment pourrais-je être heureuse alors que mon père est un oiseau ? Il me disait souvent que lorsque je serai devenue une femme, il me faudrait choisir un homme qui pense comme le poète Tahar Ben Jelloun que « Respecter une femme, c’est pouvoir envisager l’amitié avec elle; ce qui n’exclut pas le jeu de la séduction, et même, dans certains cas, le désir et l’amour. » Mais je ne suis encore qu’une enfant et toi, mon vieil ami, tu ne seras pas là pour me guider le moment venu.
- Que te disait-il d’autre ?
- De regarder l’homme que j’aimerai dans les yeux, car ils sont le miroir de l’âme et qu’une âme sombre ne peut pas se dissimuler à un regard attentif. Il ajoutait souvent que le bon aurait des mots qui parleraient à mon cœur.
Non loin de la son père qui a entendu leur conversation est parti au bord de la rivière. Il se rappelle ses jeux avec sa petite fille.
Elle a bien grandi. C’est une jeune femme à présent, pourquoi n’a-t-il pas fait ce que lui disaient les deux curieux personnages, il n’en a aucune idée. Cela lui avait paru si irréel. Aujourd’hui encore, il doute de les avoir vraiment vus.
Le temps a passé, et l’oiseau est toujours là, posté au bord de la rivière. Il espère revoir le sorcier qui l’a transformé, mais l’autre n’est jamais reparu.
Sa fille est devenue une jolie jeune femme. Il la regarde de loin Une fois de plus, elle semble triste. Des larmes coulent sur son visage fermé. Son ami le pêcheur l’écoute lui raconter son dernier chagrin d’amour.
- écoute-moi, ma belle ! Dans ce monde, personne ne remarque ta tristesse et ta douleur, mais tout le monde remarque tes erreurs ! Alors libre à toi de te lamenter sur ton sort, mais tu peux aussi te relever les manches et décider d’être actrice de ta vie ! A chaque fois que tu as choisi un idiot, ton père battait des ailes comme un fou. Ne me dis pas que tu ne l’as pas remarqué ! Mais tu n’en as jamais tenu compte.
Son père vient se poser sur ton épaule et à son tour, il essaie de lui faire comprendre ce qu’elle doit faire.
- Pourquoi ne pas écrire tout ce que tu ressens ? Confier à la page blanche tous tes tourments, toutes tes peines, toutes tes désillusions. Tu m’as souvent fait part de ce rêve d’écrire, alors lance-toi !
A peine a-t-il fini que sa fille lui tend la main et il vient se poser dessus. Elle le met sur son épaule et il se blottit dans son cou. C’est elle qui faisait cela quand elle était enfant. Elle aimait nicher son visage dans la chaleur de son cou. Sentir sa fragrance citronnée.
Soudain le monde lui paraît plus lumineux… L’air plus respirable.
- Ecrire c’est une respiration, disait Julien Green. Je vais le faire, merci à vous deux pour votre patience. Je vous aime !
Le lendemain, elle reprend la barque et part rejoindre son université. En chemin, elle fait le plein de cahiers, de crayons papier, de taille-crayons et de gommes. Le jour même, ses cours terminés, elle se rend au parc et commence à écrire.
Deux mois plus tard, les cahiers commencent à s’amonceler sur son bureau. Un soir, alors que pour une fois, elle baille aux corneilles allongée sur la pelouse, un jeune homme passe devant elle avec un oiseau sur l’épaule. Or, elle en est certaine, cet oiseau c’est son père. D’ailleurs, lorsqu’elle se lève pour aller vers lui, il s’envole et disparaît.
Que fait-il ici ? Où est passé son ami le pêcheur, il ne l’aurait jamais laissé quitter son île tout seul. Difficile pour elle de s’adresser à cet inconnu. Après tout cet oiseau n’est peut-être pas son père. Les jours suivants, elle les observe tous les deux. Ils ne se quittent pas. Le soir, elle descend et continue à noircir des pages.
Deux mois plus tard, un soir, alors qu’elle écrit un nouveau chapitre, l’oiseau vient se poser sur son épaule.
- Papa est-ce toi ? Demande-t-elle.
- Qui veux-tu que ce soit ?
- Pourquoi es-tu là et pourquoi n’es-tu pas venu plus tôt vers moi ? Où est Manuel ?
- Il est décédé ma chérie.
- Mon Dieu ! Que lui est-il arrivé ? Pourquoi ne pas être venu me le dire ?
- Je devais rendre hommage à notre vieil ami, car tu le sais : « L’amitié est un baume sur les douleurs, un joyau pour le cœur » J’ai tenu à rester près de lui jusqu’à la fin. Quand il a compris qu’il était perdu, il m’a parlé de son fils qu’il avait abandonné à sa naissance. Je lui ai promis de le retrouver et de lui parler de son père, car figures-toi qu’il a écrit à son fils chaque semaine depuis son abandon, mais sa mère lui renvoyait toutes ses lettres. Alors il a fini par les conserver chez lui espérant retrouver son fils pour les lui donner. Le jeune homme, avec qui tu me vois depuis ton arrivée ici, est ce fils. Il ne me comprend pas, alors je ne peux rien lui dire. Maudit soit ce sorcier qui me bloque dans ce corps de piaf.
- Puis-je t’aider ?
- Tu le peux. Ouvre ton cœur, car ouvrir son cœur aux autres c’est toucher à la divinité du partage.
- Je ne comprends pas papa.
- Je le sais ma chérie, alors écoute-moi attentivement. Jean Cocteau disait : « Être, c’est être là. Vivre c’est profiter d’être là » Est-ce que tu comprends ce qu’il voulait dire ?
- Je crois. A mon avis, il nous demande de profiter à fond de la vie.
- C’est bien ma puce. Cesse de passer d’un cœur à l’autre ! « Il n’est qu’une vérité en ce monde c’est que le bonheur ne s’achète pas et que bien souvent, il est tout près de toi ! » ouvre grand tes yeux, le bonheur est à portée de ta main.
- Dis-moi où ?
Ils sont interrompus par le jeune homme qui arrive
- Te voilà, mon coquin ! Je t’ai cherché partout.
Joyeusement, l’oiseau revient se poser sur l’épaule du jeune homme.
- Il ne vous a pas ennuyée, j’espère !
- Oh non ! Il est adorable. Il est venu à moi pendant que je mettais de l’engrais au pied de ce rosier fort mal en point.
- Vous avez de drôles de distractions pour une étudiante ! Je ne crois pas vous avoir vue aux fêtes organisées par les sororités.
- Je n’aime pas les plaisantins grivois et ils pullulent dans ces soirées.
- Jeudi, il y a une fête organisée par notre professeur de littérature. C’est une femme qui fait preuve de pragmatisme et je doute que des idiots s’y présentent. Par contre pour quelqu’un qui écrit cela pourrait s’avérer passionnant.
- Je ne sais pas.
- Allez remues-toi ! Je te vois toujours le nez dans tes cahiers. Je ne te connais pas d’amis. Tu restes toujours seule. Ce n’est pas une vie !
- Ecoute-le, lui chuchote son père en revenant sur son épaule Il est volontaire et courtois, mais pas que. Je suis avec lui depuis pas mal de temps, il ne cherche pas une domestique pour tenir sa maison. Ce sera un vrai partenaire
- Arrête papa, je t’en prie ! Les larmes se mettent à couleur sur son ravissant visage. Pourquoi ne me laisses-tu pas faire mes choix toute seule ?
- Parce que tu te trompes trop souvent. Victor Hugo disait : » Le vrai bonheur, c’est toi, c’est ta voix, c’est ton regard, c’est tout ce qui me charme et m’enivre. » Le jour où tu croiseras un homme qui te parle comme cela, je serai délivré de l’enchantement.
- Tu en es certain ?
- C’est Manuel qui a fini par me le dire. La seule arme contre le sorcier c’est le véritable amour. Elsa regarde le jeune homme et lui touche la poitrine du bout de sa phalange. Ok je sortirai avec toi jeudi.
- Ravi de l’entendre, je m’appelle Alain et toi ?
- Moi c’est Elsa !
- Alors à jeudi Elsa.
Il est parti et Elsa respire à nouveau. Elle a l’impression d’avoir été en apnée jusqu’à présent.
- Respire, ma chérie. Il est parti. Regarde-le, il n’arrête pas de sourire. Il rêvait de t’aborder et je lui en ai donné l’occasion. J’ai l’espoir que tu finisses par l’apprécier autant que moi.
Maridan 21/03/2020
(à suivre...)
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