Texte libre - Souvenirs d'éventail
Eventail ajouré, au pied nacré, fleurs peintes,
Admiré des passantes, étalé en vitrine
Mis bien cher à la vente car j’ai fort bonne mine
J’ai connu Châtelaines, Libertines et Saintes.
J’ai parfois côtoyé des mains gantées de noir
Et du cohabiter avec leurs chapelets.
Elles m’agitaient sans cesse dans la chaleur du soir
A la messe des morts en Espagne l’été.
Des doigts cerclés de bagues serties de perles fines
M’ont tenu fort serré sous les jolies poitrines
De nobles demoiselles aux élans amoureux,
Et de leurs cœurs aimants j’étais le battement.
Me dépliant d’un coup, elles fendaient l’air de feu
Quand le rouge des joues leur réclamait du vent.
Des yeux mystérieux par-dessus mes dentelles
Lançaient douces œillades aux chevaliers du ciel.
J’ai frôlé des genoux sur des bas en résille,
Brusquement repliés par des amants fougueux
Posés près de bougies aux senteurs de vanille
Sur le coin d’un chevet, Ô, repos délicieux.
J’ai connu des pochettes, des sacs et des tiroirs
Des boites à bijoux, le tréfonds des armoires
Jusqu’au jour malheureux où un mari jaloux
M’a laissé pour deux sous à un marchant filou.
Le vieil époux bafoué m’avait trouvé au sol
Près d’un sofa grenat dans un salon privé
Un infâme notable, amant très courtisé
Avait séduit la Dame avec un doigt d’alcool.
Je me retrouve donc sur un portant de bois
A dévoiler mes charmes aux dames en émoi
Qui rêvent d’éventer les nuits de pleine lune
Les corps tièdes, sucrés aux peaux lisses et brunes
De Princes étrangers aux histoires insensées
Qu’un génie oriental aime leur raconter.
Elles respirent pâmées dans le plus grand secret
Des livres brochés d'or aux encres parfumées
Qui me voit aujourd’hui, simplement exposé
Au milieu des mantilles, colliers et bracelets
Ne sait les mille vies que j’ai connues exquises
Combien je suis encore objet de convoitise !
Clohe
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