Maridan-Gyres

Maridan-Gyres

Texte libre

 

 

Florine et la Sculpture.

 

« Qu’ils étaient beaux les vases et les plats du potier sur le marché ce matin, se dit Florine,  j’ai envie de  malaxer cette pâte rouge, d’y enfourner mes doigts, de la presser, de la remuer, la travailler, la faire mienne. Camille m’a raconté comment dans sa jeunesse  sa vieille servante pétrissait, pliait et repliait la pâte à tarte jusqu’au feuilletage et lui en  laissait souvent de petits morceaux qu’elle transformait  en figurines. Ça devait être d’un drôle !  Mais je n’ai pas de servante cuisinière, alors  !  »

 

 

Florine est une bonne nature, pas envieuse, débrouillarde mais son engouement est totalement incongru pour sa famille ; son père et sa mère acharnés au  travail de la ferme  lui reprochent de perdre son temps et de les priver de son aide.

Il a même été question de la mettre à la porte, seul Florian, son frère jumeau,  la défend. Il aime tant la voir heureuse, les mains dans la glaise façonner ses petits personnages. 

Il a menacé de quitter la ferme, de se faire embaucher là où manquent des bras, bien loin du pays si une chance n’était pas laissée à sa jumelle. Les parents ont capitulé, ne voulant pas se séparer d’un ouvrier agricole si peu coûteux, mais jusqu’à la prochaine moisson seulement.

Florine a quelques mois pour devenir praticienne auprès d’un sculpteur et cesser d’être une bouche à nourrir  sinon elle devra reprendre ses bottes de fermière et abandonner ses « fantaisies ». Souvent elle vit un horrible cauchemar, elle perd pied dans un marais à la recherche d’une statuette sans visage,  s’enfonce dans des sables mouvants jusqu’à la gorge  et se réveille  fiévreuse et terrifiée.

 

Pour l’heure, pourvu qu’elle puisse aller chercher l’argile au cœur de la forêt, tout va bien. La voilà donc  partie, à grands pas, les cheveux défaits, sa jupe et ses bottines crottées et les mains rougies de froid sans gants.

Elle aime tant le crépuscule quand le soleil s’infiltre dans la futaie irrégulière de semis et vieux arbres. Elle  admire les flammèches mordorées qui  lèchent les troncs élancés, les branches tortueuses et la mousse et aussi le fauve flamboyant  qui inonde  le chemin de terre, les flaques témoins de la pluie récente et les herbes drues.

Florine est éblouie par la force de cette lumière, elle cligne des yeux et cherche un passage.

 

« Mais je me suis trompée !... Bof, par l’un ou l’autre sentier, je rejoindrai les Trois Croix. Je vais couper au plus court. »  

 

Elle emprunte une piste à lapins, une sente étroite sinueuse, peu tracée, à la végétation enchevêtrée. Ses chaussettes s’accrochent  à des ronces basses mais elle poursuit, déterminée, frôlant les millepertuis, marguerites et pissenlits qui affleurent dans ce fouillis. Elle chantonne.

 

« Farandoles fleuries 

Flamboiement, furet furtif,

Fol  flûteau, fuite ! Floc… »

 

Après un bon quart d’heure, elle se heurte à un écran inattendu de sapins. Le jour  baisse, le soleil fond  peu à peu à l’horizon. L’endroit est  peu engageant.

 

« J’entends des coups ! Qui frappe ? » 

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Elle découvre un bûcheron à la longue chevelure en chemise à grands carreaux en train de buriner une souche à la hache. Plusieurs objets au sol  l’intriguent et la ravissent : des animaux sculptés, un  petit chien, une silhouette simpliste, un socle où reposent des livres et un autre surmonté d’une croix. L’homme  a entendu bruisser les feuillages,  Il pose son outil, s’avance vers elle d’un pas lourd, ses bottes en pied de sanglier font crisser les feuilles sèches. Un peu apeurée, Florine  remarque ses mains puissantes.

 

  • « Bonjour Monsieur,  Je me suis égarée, je veux  rejoindre la colline aux carrières.
  • A cette heure-ci,  Et pour quoi faire Belle Demoiselle ?
  • Pour prendre de la terre, je la  modèle, et  vous vous  sculptez le bois, c’est  très beau,
  • eh bien, venez voir mes petites œuvres de plus près, n’ayez crainte, je ne mange personne, les ogres ont disparu ! »

 

Florine  un peu embarrassée  s’approche des petits sujets.

 

  • « Je peux les toucher ?
  • Oui, oui, prenez les, la texture du bois est chaude et douce, je lisse toutes les aspérités avec une lime en diamant. Si l’un d’eux vous plait, je vous le donne, je n’ai pas si souvent l’occasion d’une visite, mes admirateurs sont les animaux ! »

 

Florine les prend un à un, passe ses doigts longuement sur chacun et ferme les yeux pour mieux ressentir les formes, les volumes et la matière.

 

  • « Comme c’est vivant ! J’aime surtout la chouette naine, elle a des yeux incroyables comme les vrais, fixes et fascinants.
  • Je vous la laisse volontiers, c’est un porte bonheur, ainsi personne n’étouffera votre talent.  Revenez me voir à l’occasion, et apportez moi  une de vos petites figurines si vous voulez bien.  En attendant   je vous indique votre direction : suivez le chemin caillouteux qui descend et soyez attentive au chant de la chouette chevêche qui  fait le guet sur une haie et sert de repère pour retrouver la bonne voie vers la colline.
  • Grand Merci, nous nous reverrons surement, il suffira que je m’égare un peu ! »

 

La voilà donc repartie vers l’ouest encore rougeoyant,  elle presse le pas mais plus elle avance et moins la forêt s’éclaircit, pas de haies en vue.

 

«  C’est bizarre, je vais couper à travers le bois, ça ne peut aboutir qu’à la vallée, tant pis pour la terre ce soir. Je vais rentrer. »

 

Elle dévale, enjambe les buissons, s’agrippe aux arbustes,  et Ô bonheur,  elle entrevoit  3 chênes et une haie de noisetiers, elle se précipite vers eux s’agrippant à des branchages pour ne pas tomber, elle s’attend à entendre la chouette chevêche  mais,  surprise ! Elle  aperçoit une jeune femme  assise sur un rondin  à côté de son panier en train de manger une galette et boire du cidre et qui tire des cartes d’un jeu de tarot divinatoire.

Tout de rouge vêtue, longue jupe fendue sur dentelles, talons hauts, bonnet  fleuri de coquelicots, chemiser ouvert laissant voir la peau laiteuse du décolleté, elle lève la tête, alertée par un  petit craquement,  sourit, et interpelle Florine.

 

  • « Hello ! Tu fais quoi dans la forêt ? Moi, On m’appelle  le Petit Chaperon Rouge, J’attends le Loup pour aller dîner. Il est en retard, encore un coup du Renard, ces deux-là, ils sont toujours à faire des blagues aux corbeaux, aux poules,  alors je joue, je  grignote pour patienter ! Tu en veux ? »

 

Florine stupéfaite, troublée  mais fatiguée s’approche et lui dit :

 

  • « Pourquoi pas, une pause goûter me fera du bien, je marche depuis 2 heures à la recherche des Trois Croix, un bûcheron artiste  m’a mise sur  une voie, mais c’est  pas la bonne ou je  n’ai pas compris ?
  • Ne t’en fais pas, tu trouveras, profite du moment. »

 

Florine pose sa chouette naine  au sol et s’assied à côté de Mademoiselle Chaperon.

 

  • « Merci pour la galette et le cidre, ça fait du bien,  mais vous êtes bien élégamment habillée pour être au milieu des bois ?
  • Que veux-tu, le Loup aime les tenues seyantes, nous sommes fiancés depuis peu, et il en a eu des chaperons ! Je peux te le dire !! Et toi tu ferais bien de prendre soin de ta personne si tu veux un bon  mari, tu as vu comme ta jupe est sale ? J’ai sûrement une robe à te donner .On en reparle. Je te ferai un tarot. »

 

Florine  se demande si tout ceci n’est pas une illusion, un songe, un maléfice ? Depuis son départ vers la colline, tout ce qui se passe est improbable, insensé...et elle entend et s’entend dire des choses impensables.

Et voilà que le Loup arrive, la queue entre les jambes, c’est un bel animal au pelage épais gris et blanc, aux yeux fendus vert doré et aux crocs étincelants. La demoiselle Chaperon ramasse ses affaires, se lève l’air sévère mais ne dit mot. La Bête s’aplatit et elle monte sur son dos…

 

  • « Bon, je te laisse, car nous sommes invités chez Blanche Neige  mais seuls les personnages des anciens contes de fées sont admis.  Elle en a pris un coup de vieux la Blanche Neige avec les sept nains, ils sont devenus acariâtres, les temps ont changé, elle est leur esclave. Pour en revenir à toi,  pour te repérer,  trouve  la grande ourse et suis l’étoile polaire, elle indique le nord, c’est ta direction et n’oublie pas  prends soin de ta personne, de tes mains aussi !  Tu peux sculpter et être  « fashionista », j’ai une bonne intuition pour toi !  Adieu»

 

Le curieux attelage de la Belle sur la Bête s’ébranle et s’enfonce dans les bois.

Florine  les regarde s’éloigner avec l’impression d’avoir changé de monde.

 

  • « Non, mais en vrai,  j’ai vu le Chaperon Rouge, jeune femme, cartomancienne,  fiancée avec un Loup, invités  à  diner chez Blanche Neige ?  Et je le crois ? Déjà le Bûcheron sculpteur exilé dans ce sous-bois  c’était saugrenu, mais alors là !  Ça dépasse l’entendement, pourtant j’ai bien mangé la galette… à qui je vais raconter ça ? … On va me prendre pour une folle…en attendant, en route, ma fille, tu n’es pas rendue»

 

Florine soupire et courageusement reprend sa marche les yeux fixés au ciel  pour ne pas louper l’étoile au point qu’elle trébuche sur une racine et s’étale de tout son long sur le sol humide, elle se relève d’un bond, et, comme par miracle détecte une spirale de fumée au-dessus d’un petit vallon en contrebas. Elle court, elle en oublie ses jambes lourdes,  redouble d’efforts, et arrive essoufflée,  le cœur battant aux oreilles, près d’une cabane éclairée par la lune.

 

  • « Vivement que je puisse m’asseoir  et boire chaud. J’entends de la musique...frappons frappons ! Tiens, personne ne répond, allez  j’entre. Mais qui  sont ceux-là ? »

 

A sa grande surprise, elle voit un très jeune homme en perruque courte, veste rouge et jabot blanc qui joue du piano et un autre homme plus âgé en perruque longue et bouclée et en habit sombre penché sur une écritoire en bois, qui fait courir une plume d’oie sur un parchemin.

Ils arrêtent leurs occupations, se lèvent, la saluent, et  se présentent :

 

  • « Bienvenue chez nous,  Belle Demoiselle,  W. Amadeus Mozart, musicien, Jean de la Fontaine, poète.  Et  vous ? »

 

Elle bredouille

 

  • « Florine, apprentie sculptrice », Elle voudrait rajouter :
  • « Protégée de Mademoiselle Camille Claudel, elle-même praticienne  de Monsieur Rodin »

 

mais elle reste sans voix.

 

  • « eh bien Mademoiselle, félicitations pour votre inclination  pour l’art, finissez d’entrer, »

 

WA  l’invite à s’asseoir.

Florine ne bouge pas, médusée. Rencontrer le Petit Chaperon Rouge c’était déjà invraisemblable mais alors là ! Elle se sent mal et perd connaissance. Quand elle reprend ses esprits, WA lui tend un godet d’eau et Jean de la Fontaine un morceau de pain bis avec du miel.

 

  • « Comme c’est bon ! Merci Messieurs…mais que tout ça est étrange, vous rencontrer ? Vous ! Je me sens si petite, si bouleversée,  si confuse…pardonnez-moi !
  • Détendez-vous, nous sommes là pour vous, prenez la paillasse près du feu, reposez-vous, l’édredon de plume est douillet, je vais vous jouer ma petite musique de nuit, on dit que mes notes font merveille pour calmer l’âme, laissez-vous emporter par elles »

 

En quelques minutes Florine tombe dans un lourd sommeil peuplé de rêves poétiques, de constellations, de chants d’oiseaux, de lapins blancs, d’écureuils espiègles, de rivières claires, de nénuphars, et de rires d’enfants.

Pendant ce temps, Wolfgang change d’instrument, prend le violon, puis revient au clavier, et Jean noircit ses pages de lignes serrées sans lever  sa plume.

Tout à coup, un coucou tonitruant sort de l’horloge, sonne minuit et  fait sursauter le poète comme chaque soir… puis il rentre dans sa maisonnette en gloussant ravi de son effet sans cesse renouvelé… 

 

  • « Ces artistes sont complètement déphasés !»  chante son cervelet d’oiseau.
  • « Il serait donc  temps de dîner !   Je vais faire chauffer la soupe et préparer une omelette aux girolles » se dit Jean de la Fontaine, sachant que W A ne lui prêtera pas la main, toujours plongé dans ses partitions,

 

Le voilà donc debout, il met son tablier de cuisine où courent fourmis et volent cigales, pose sa perruque (qui trempe parfois dans le bouillon) et verse un potage épais et odorant dans une  marmite sur un trépied dans la cheminée. Il en a l’eau à la bouche. Les animaux  de ses trois dernières fables l’ont affamé : Le loup et la cigogne, le loup et  l’agneau, le corbeau et le renard.

 

« On n’arrête pas de manger dans mes histoires !»

 

Et le voilà qui met le couvert, de belles assiettes creuses de porcelaine ornées de fleurs des champs, de longs verres à pied en cristal, des couverts en argent sur une nappe aux mêmes motifs que les assiettes et une carafe au long col (comme celui de la cigogne)

Il a plaisir à faire une belle table rien que pour eux deux tous les jours, le repas est une fête.

Jean appelle Wolfgang sans succès, à pas de loup, il va le secouer par les épaules …

 

  • ah, mais que tu me fais peur, tu es pire que le coucou ! et ça marche  à chaque fois, c’est déjà l’heure ? J’ai écrit deux menuets pour la Belle Endormie, tu as vu comme elle est gracieuse malgré ses vilains vêtements, elle danse peut être, et si ça se trouve, en plus,  elle a une voix délicieuse comme un rossignol, tiens à ce propos tu n’en aurais pas un spécimen dans ton catalogue animalier au lieu de ce coucou à 2 notes !  … »

 

Jean  hausse les sourcils :

 

  • « mais c’est juste une mécanique, on ne lui demande pas de chanter une mélodie de ta composition, prends place plutôt et viens manger.

 

Il apporte la  soupière en vermeil et le fumet qui en sort flatte les narines des deux acolytes.

Après cette entrée simple mais fort savoureuse, Jean bat les œufs et y mêle les girolles, tout dore très vite dans la poêle en fonte et une fois servi, c’est merveille à voir et à  faire fondre dans la bouche avec juste une tranche de pain croustillant (car Jean s’occupe aussi du four à pain).

Wolfgang remonte une bouteille de la cave, c’est son affaire.  Ils trinquent, rite de chaque soir, à leurs inspirations,  à leurs œuvres, à leurs succès, à leurs critiques, à la vie, à tout quoi ! ? Et en plus, pour l’occasion  à la Belle endormie.

Une fois rassasiés les 2 comparses s’assoient près du  feu dans de grands fauteuils de vieux velours grenat et entament leurs conversations artistiques jusqu’au petit matin. Ils ne dorment que quelques heures puis reprennent leurs occupations. Musique et Poésie, sources intarissables que le temps ne traverse pas, mais qui le rendent éternel.

Florine, loin  de philosopher,  se réveille aux premiers rayons du soleil qui filtrent à travers un œil de bœuf, elle  savoure encore quelques instants la chaleur de son lit improvisé, puis elle s’étire, baille et se souvient. Elle s’assied en bondissant et l’inquiétude l’assaille

  • « Mais qu’est-ce que je fais là ? et ces deux-là  qui sont à la même place qu’hier, on croirait des statues»

Mais les statues bougent et parlent !

  •  « Vous vous êtes endormie bien vite, Belle Demoiselle, j’espère que vous êtes reposée,  venez, venez boire  du  lait chaud et  manger des petits pains dorés  à la confiture. Recettes de Jean  pour vous »

Florine  se lève, secoue un peu sa jupe, passe les doigts dans ses cheveux et prend une chaise. La table est joliment arrangée, un petit chemin de table aux fruits rouges, un grand bol fumant pour elle et des gourmandises.

« Comme c’est délicieux ! Que vous êtes aimables de me gâter ainsi »

Elle se délecte, puis elle demande :

  •  «  je suis dans un conte ou quoi ? J’ai peine à croire que tout ceci est réel !et pourquoi cette aventure hors du temps ? les autres, vous, je suis morte ou vive ? »
  •  « Apaisez-vous, écoutez-moi : Vous savez que j’utilise les animaux pour parler des hommes, eh bien c’est un peu pareil, vous vivez une sorte d’allégorie, chacune des étapes de ce périple vous a amenée à des rencontres qui ont une signification » dit Jean de la Fontaine «  lesquelles ? Qu’en retiendrez-vous ? Prenez le temps de réfléchir quand vous aurez quitté ce lieu »
  • «  Il y a toujours plusieurs façons de regarder un visage dans un miroir, de lire une fable, d’écouter une voix, des instruments, la création est infinie pour qui s’émerveille de la diversité et s’en empare  » ajoute WA.

Florine, interpellée, ne sait que penser. Que sont ces énigmes ? Elle sait qu’est venu le moment de partir. Elle voit les yeux souriants et pacifiques des deux hommes qui l’encouragent à reprendre son chemin, lui donnent un petit sac de tissu rempli de noisettes, de noix, de pâtes de fruits et de pain d’épices. Ils lui font une révérence et elle les salue en se courbant légèrement, gracieusement,  les mains jointes devant sa jolie bouche mutine. 

Florine  les quitte à regret, elle se sent très seule soudainement. Elle ferme la porte de la cabane, des larmes perlent au coin de ses yeux, puis, elle reprend la route vers la carrière sans hésitation pour aller chercher  sa terre, cette fois, et la rapporter.

A midi, quand le soleil est au zénith, Elle  entre dans son « Atelier » de fortune mais  curieusement elle a le cœur lourd.

Elle est assise dans un coin de grange aménagé avec une grande ouverture qui laisse passer la belle lumière  mais aussi le froid et qui lui sert d’endroit pour ses exercices de modelage.  Elle soupire, son souffle met de la buée sur un vieux  miroir tout rayé  où elle aperçoit la tristesse de son regard bleu.

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Le chat Pamplemousse aux yeux vert d’eau ronronne dans un carton à ses pieds et lui redonne le sourire et du cœur à l’ouvrage.

  • « Assez ma fille » se dit-elle,  ce n’est pas le moment de perdre espoir, tu sais bien que sculpter est lappel de ton âme, de tout ton être, alors oublie la maison, les parents, les champs, les bêtes, le travail de la ferme, ton cauchemar, crois en ta bonne étoile qui t’a conduite dans cette aventure insolite. Laisse toi emporter par tes désirs, réalise tes rêves.
  • Le bûcheron t’a dit : « personne n’étouffera  votre talent »  tu as la chouette porte bonheur, garde la précieusement ; rappelle-toi comme il est heureux, lui.
  • Le chaperon rouge t’a dit : « j’ai une bonne intuition pour toi » et cette alliance avec le loup est comme  un symbole extravagant que rien n’est  impossible ;
  • Le poète et le musicien, duo ô combien hors des sentiers battus, t’ont fait comprendre qu’une apparence peut en cacher une autre, que la vie est surprenante, et que chacune de ses facettes vaut d’être regardée, appréciée, explorée,  ce périple est une opportunité ;
  • Camille t’a dit qu’elle te présenterait à Rodin quand tu serais prête, et aussi de garder confiance et de te mettre au travail inlassablement…ce serait extraordinaire  de rencontrer le Maître… »

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Alors Florine se lève, enfile sa blouse, regarde ses mains, s’assied à la petite table et commence à faire des croquis avec rigueur et patience, de l’œuvre  qu’elle appellera « L’ingénue en sommeil », œuvre originale  et aboutie après plusieurs semaines d’activité  enfiévrée.  Ce sera son « morceau de réception » au Salon d’Automne, il lui  vaudra un premier prix,  une entrée très remarquée dans le monde très peu féminin  de la sculpture et le regard très enveloppant d’un jeune  poète qui lui dédira ces vers :

 

 

Ingénue endormie

Au visage  innocent

Crois-tu pouvoir aimer

Cet amoureux transi

Qui frôle de ses yeux

La blancheur de ta mine

Et fais rougir le front

Des vieilles assagies

Quand de sa main câline

Tes courbes il dessine.

 

Clohe



12/05/2020
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