Atelier 4 - 2023 - Sujets 2 et 4
Bonjour les amis,
Il faut absolument que je vous raconte ce qui m’est arrivé pendant ces dernières vacances. J’ai découvert dans une vieille malle pourrie abandonnée dans le grenier de ma grand-mère un livre plein de poussière. Sur le coup, je me suis dis que c’était l’ouvrage d’une fée. En effet, la couverture mystérieuse représentait comme un médaillon d’un bleu saphir, disposé entre deux lunes, une tournée vers le ciel et l’autre vers la terre.
Je me suis dépêchée d’aller dans ma chambre, et après avoir soigneusement fermé la porte à clé, je me suis allongée sur le lit avant de prendre délicatement possession de ce manuscrit d’un autre temps. Après de multiples tentatives infructueuses, je réussis à débloquer le petit cadenas car j’avais eu la possibilité de me procurer des outils particuliers dans l’atelier de mon père, dont un minuscule tournevis et une superbe loupe.
Ça y est, doucement ma belle, pas de précipitation. Depuis que cette merveille est dans ce lieu, je trouve extraordinaire que personne n’ait jamais eu envie de le prendre dans les mains et d’en tourner délicatement les pages avec des doigts précautionneusement recouverts de gants.
Et me voici partie à la découverte de ce superbe manuscrit. Oh, c’est une histoire qui s’est déroulée il y a fort longtemps, dans un vieux manoir situé au milieu d’une forêt irlandaise. Une petite fille vivait là avec ses parents, sa gouvernante Madeleine et son précepteur Monsieur Arthur ; ces derniers ne possédaient guère d’humour, et ils ne lui laissaient guère de temps libre pour s’adonner à sa passion les arts, la musique, le dessin. Son désir de liberté lui attirait souvent des ennuis car tout ce qui l’entourait était source de découverte et la poussait à s’enfuir pour agrandir son terrain de jeu. Sa mère n’avait pu donner un deuxième enfant au baron qui se résigna peu à peu et donna encore plus de liberté à notre jeune héroïne. Il faut vous dire qu’elle exerçait sur lui un certain magnétisme avec ses grands yeux bleus et qu’avec sa petite voix fluette et ses mimiques elle savait y faire pour attendrir ce père aimant.
C’est ainsi qu’un jour elle se faufila dans le bureau du baron et décida de se glisser à travers le grand miroir situé au-dessus de la cheminée, malgré les avertissements sévères de sa mère et de Madeleine. D’après leurs dires, cette glace était magique, mais si l’on s’en approchait de trop près, elle vous engloutissait. Ainsi, certaines personnes de la lignée du baron avaient-elles disparues à jamais, la veille de leurs noces. Comme vous pouvez l’imaginer, cette légende piqua à vif la curiosité de notre demoiselle qui, ni une, ni deux grimpa sur le tablier de la cheminée et se laissa glisser à l’intérieur du miroir. On ne vit bientôt plus les grands plis de sa robe blanche, ni ses petites ballerines noires. Tout avait disparu. L’horloge sonna les douze coups de midi dans le grand bureau désormais vide.
Cela faisait deux bonnes heures que la maisonnée était à la recherche de la demoiselle. Personne ne l’avait vue ou entendue depuis qu’elle était entrée dans le bureau de son père, or celui-ci était entièrement inoccupé. Madame la baronne s’inquiétait car son mari n’allait pas tarder à revenir et serait surement très surpris de ne pas voir sa fille accourir au bruit de ses pas sur le carrelage du grand hall d’entrée. Il fallait se dépêcher de retrouver la jeune fille. La maîtresse de maison s’installa un instant dans le grand fauteuil de son époux pour décompresser. Son médecin de famille lui avait conseillé, suite à une très mauvaise grippe l’hiver dernier de se ménager et surtout d’éviter toutes surprises. Cette assise était tout à fait idéale et lui fit l’effet d’un soulagement immédiat et absolu.
Hélas, un bruit d’une ampleur extrême se produisit dans son dos, ce qui faillit la faire se renverser. En se tournant, qu’elle ne fut pas sa surprise de voir sa fille s’extirper du miroir. L’horloge carillonna pour indiquer qu’il était exactement deux heures de l’après-midi. La baronne se leva, prit sur elle-même pour ne pas hurler. Elle se remémora ses cours de yoga et fixa son esprit sur sa respiration «expirer-inspirer, expirer-inspirer »…
Notre petite voyageuse était toute joyeuse de son périple dans le monde mystérieux dont elle revenait.
- Mère, que faites-vous là ? Père n’aime pas que vous entriez dans son bureau. Je suis la seule à qui il le permet du reste.
- Figurez-vous, chère enfant, que toute la maisonnée est à votre recherche depuis deux bonnes heures. La couturière était venue vous faire essayer de nouvelles toilettes pour le bal de la fin du mois, et nous n’arrivions pas à vous retrouver. Votre disparition m’a déclenché des palpitations et j’ai bien cru ma dernière heure arrivée. Ne vous avions-nous pas interdit d’aller de l’autre côté de ce miroir ? Vous n’en faites jamais qu’à votre tête. Votre père sera très déçu de votre comportement. Mais, que vois-je ? Qu’est-ce que fait cette boule de poils bleue et blanche à vos pieds ? D’où vient-elle ? Auriez-vous perdu la tête de faire entrer une telle chose dans notre demeure ?
- D’abord, sachez, mère, que ce n’est pas une chose ! C’est un chatte intersidérale, elle s’appelle Odessa. Et de plus, elle….
- Silence malheureuse ! Ne dis à personne que je peux parler et que mes grands yeux bleus me permettent de voir à l’intérieur de tout être humain. Cela doit rester notre secret à jamais. Je ne peux converser qu’avec des individus au cœur pur comme toi. Les autres humains ne sont pour moi que de vils personnages à deux pieds. Si quelqu’un découvrait notre secret je devrais impérativement retourner avec mes semblables dans le monde dont tu viens de faire la découverte.
- Je sais que vous êtes allergique aux poils de chat mère, mais je puis vous assurer qu’Odessa possède de beaux poils longs brillants et lisses, et de plus non allergisants. Je l’ai personnellement caressée pendant ces deux dernières heures et voyez, je n’éternue point, je ne me frotte pas les yeux. Je vous en prie, permettez-moi de la garder auprès de moi. Je n’ai guère d’amies dans notre grande maison familiale et elle sera comme une sœur pour moi. Dans les endroits sombres, ses grands yeux me guident facilement.
- Bon, pour l’instant elle peut rester. Nous demanderons l’avis de votre père dès son retour qui ne devrait pas tarder d’ailleurs. Allez vous laver les mains en cuisine et emmenez Odessa, la cuisinière trouvera bien quelque chose à lui donner à manger. Mais je vous en conjure, ne la laissez pas entrer dans ma chambre.
- Merci, merci. Allez, viens Odessa filons en cuisine avant que mère ne revienne sur sa décision.
- Madame la baronne à l’air douce. Je pense que je vais bien m’entendre avec elle. Mais qui est l’homme que j’aperçois dans le jardin ?
- Ah lui, c’est Monsieur Arthur, mon professeur de maths, physique, langue, etc bref, un homme d’une tristesse à mourir. Je n’ai jamais vu sur son visage ne serait-ce que l’ébauche d’un sourire.
- Tu as bien fait de me prévenir, je raserai les murs quand je le croiserai, sinon je crains de ressentir le besoin d’exercer mes griffes sur ses mollets qui m’ont l’air bien dodus !
- Seigneur, NON ! Il serait capable de me mettre de mauvaises notes jusqu’à la fin de l’année scolaire. Allez, viens, Catherine, la cuisinière nous a surement préparé un petit encas. Elle crie un peu de temps en temps quand ses marmitons ne travaillent pas correctement, mais c’est une bonne personne qui a le cœur sur la main.
Fleurs de mai
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