Maridan-Gyres

Maridan-Gyres

Atelier 3 - 2022 - sujet 2

 

Petit pont de bois.

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Quelques vieilles traverses de chemin de fer réformées ont fait le bonheur de ce petit pont à la ligne courbe et douce. Il  tient debout par un grand mystère et le disjointement de ses éléments lui donne un certain style, rustique mais confortable.

Dans son écrin gris, il nous permet d’accéder, oh miracle ! À cette maisonnette mystérieuse.

Le gris de l’eau rejoint le gris du ciel effaçant la ligne d’horizon.

La chevelure mordorée des saules dans ses couleurs automnales, couvre la toiture d’une coiffure élaborée, lumineuse dans cette grisaille ; elle se reflète dans l’eau et entoure le petit pont d’une bordure délicate, protectrice.

Ciel gris, eau grise, ombres grises… mais devant la masure le petit sapin vestige sans doute d’un noël passé, joyeux et plein d’enfants, de lumières et de cadeaux, de projets et d’espérance trône  là, impérial et vigoureux. Ses racines gourmandes ont su trouver nourriture adaptée à sa condition sylvestre, dans ce lieu improbable et magique.

Surtout, ne soyez pas tenté, comme moi, de zoomer sur la photo ! Vous pourriez découvrir à votre grand étonnement, derrière les vitres opacifiées par la poussière et les années,  le profil anguleux  du propriétaire des lieux.

Blanche est sa barbe démesurée. Elle grignote ses joues ne laissant qu’un petit bout de pommette de peau burinée, blancs aussi ses sourcils hirsutes en accent circonflexe qui ombragent ses petits yeux à la couleur indéfinissable, mais à l’acuité  perçante, blancs, mais rares, ses quelques cheveux couronnant un crâne dégarni … qui est cet homme, effrayant et secret ?

Dans sa maisonnette mystérieuse, vit cet homme mystérieux, sur cet îlot mystérieux.

Soudain le vent fait frissonner la chevelure dorée et une plainte s’échappe par-delà la bicoque.

Voilà que maintenant l’image émet des sons !

Derrière l’autre fenêtre on distingue furtivement  une petite lumière qui vacille, puis disparaît,  apparaît à nouveau.

Le mystère reste entier et aiguise ma curiosité. Scrutant  attentivement la scène qui s’offre à mes yeux ébahis, je torture mes méninges pour découvrir l’énigme. J’échafaude  des plans bizarres. Je laisse mon imagination gambader, serait-ce le refuge d’un ermite du siècle passé ? Le cousin de merlin l’enchanteur ? Le  mari de de la sorcière de blanche neige ? Le fils de l’ogre du Petit Poucet ?

 

-         Chérie ! A table !

 

Ciel mon mari ! (Qui ne ressemble en rien à l’hôte de la bicoque !)

Je reprends brusquement mes esprits. Une bonne odeur de pizza parvient jusqu’à moi, éveillant un sentiment gourmand et affamé. 

 

-         Oui, oui, j’arrive !

 

Je jette un œil amusé mais déboussolé sur l’écran de mon ordinateur, où la photo proposée par Maridan offre un petit tableau de douceur, dont la couleur et la simplicité enchantent mon regard.

Mais où étais-je partie ?

Etait-ce un effet d’optique dû à ma vue fatiguée d’avoir  trop joué sur mon écran ces jours-ci de confinement imposé ? (Covid oblige !) toujours est-il que c’est beaucoup mieux ainsi : plus d’ogre ni de  sorcier consort, plus de plans diaboliques, seulement un havre de tendresse pour abriter des fabricants et conteurs de belles histoires au bord de l’eau calme et langoureuse de l’étang, où les tanches et les petits poissons vivent heureux, où les grenouilles chantent mélodieuses le soir venu, en attendant que le ciel chasse la grisaille, revête son manteau bleu nuit et que les étoiles, tels des yeux bienveillants viennent éclairer la voute céleste, en se reflétant dans l’eau apaisée.

 

Bon appétit mon chéri.                                                 

 

Shunt 17.02.22  – version 2.



23/02/2022
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