Atelier 1 - 2021 - sujets 1 et 2
JE ME SOUVIENS.
Je me souviens de l’hiver 1954.
La neige, épaisse et glacée avait recouvert une grande partie de la France et notre région n’était pas épargnée.
Je me souviens de ce matin extrêmement froid où Maman m’avait exceptionnellement accompagnée à l’école.
Je me souviens, l’air brulait les bronches malgré le cache col de laine bleue qu’elle m’avait tricoté. Seuls les yeux, qui restaient accessibles à la morsure de l’air, par la fente de la cagoule de laine bleue elle aussi, clignaient sans cesse comme pour éviter le gel. Les pieds butaient sur les trottoirs mal dégagés, et rendaient la marche difficile.
Je me souviens des deux kilomètres qu’il fallait effectuer pour rejoindre l’école. La route était longue. Le jour n’était pas totalement levé. Quelques corbeaux croassaient, lugubres.
Je me souviens que Maman avait pris en charge mon cartable de cuir noir chargé de livres et autres cahiers. Tout le monde vivait au ralenti. Un rythme de survie même devrais-je dire, s’était installé dans la France entière.
Je me souviens qu’à la radio, l’Abbé Pierre avait lancé la propagande pour que l’on vienne en aide aux sans-abris, suite à la mort d’une femme sur un trottoir parisien, expulsée de son logement dans cet hiver horrible.
Je me souviens.
Je me souviens du goût du grand bol de lait fumant que l’institutrice, élégante et toujours très proprette, servait sur un plateau de bois brut à tous les élèves qui arrivaient à l’école malgré les conditions difficiles.
Je me souviens de l’un de mes camarades, météorologue en herbe, qui expliquait avec une assurance innée pourquoi et comment le climat faisait des siennes. Nous étions tous pendus à ses lèvres, tremblants devant ses affirmations.
Je me souviens, et je n’oublierais jamais.
Shunt 09.01.2021
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