Maridan-Gyres

Maridan-Gyres

Logo rallye du 18/12/2013

 

Ivrogne, l’insulte avait fusé. J’étais furieuse. Comment ce goujat avait-il osé ? Le scélérat n’était qu’un pauvre type qui ne tenait plus debout. Il m’avait insultée parce que je m’étais saisi d’une coupe de champagne qu’il convoitait. Il était totalement bourré, mais pas moi. Ce type glauque ne cessait de bousculer les femmes qui passaient à sa proximité. Il était évident qu’il était rond comme un cochon.

 

Il se rapprocha d’une femme près de moi, dans le but, lui susurra-t-il à l’oreille, de l’inviter à danser une valse en sa compagnie.

 

Amusée, je le regardai en me demandant ce qui arriverait, si d’aventure, je craquais une allumette, au moment où il ouvrirait à nouveau sa bouche largement alcoolisée. Sûrement un geyser de feu, pensai-je avec dégoût. Je m’éloignai du soûlard et je me dirigeai lentement vers la sortie. Un autre triste sire apparut à cet instant précis. Celui-là, je le connaissais bien. Un vrai coucou !

 

Nombre de mes amies s’étaient fait piéger par le sourire enjôleur du garçon, qui ne manquait pas d’attraits physiques. Malheureusement pour elles, c’était là ses uniques qualités. Aussi, me montrai-je très réservée, lorsqu’une de mes amies tint à me présenter le sombre personnage.

 

« Ma chérie, tu verras, cet homme est merveilleux ! J’en suis raide dingue ! »

 

Devant mon peu d’enthousiasme à cette annonce, elle me demanda pourquoi, j’étais si sévère avec à son nouveau chéri ?

 

« Ton coucou, lui dis-je, ne travaille pas, ne t’aidera pas plus à la maison, il a des idées sur tout et surtout des idées qu’il ne mettra jamais en pratique. De plus, tu auras toutes les peines du monde à le faire sortir de chez toi, quand tu te seras lassée de sa belle gueule. Car crois-moi sur parole, tu te lasseras vite de ses nombreuses infidélités. »

 

« Tu ne comprends rien à l’amour ! »

 

L’objet de cette discussion s’était éloigné et avait continué à boire, tout en essayant de voir si une proie plus disponible, que mon amie, pouvait faire l’objet de sa cour. De loin, je le vis se vautrer de manière on ne peut moins gracieuse, sur une jeune fille qui arrivait à cet instant précis. Pas gêné, alors que 5 minutes plus tôt il roucoulait avec mon amie, il se mit à tenter de manière plus que maladroite de séduire sa jeune victime. Celle-ci ne prêta aucune attention aux manœuvres malhabiles et ridicules du sinistre personnage. Il revint alors vers mon amie, avec un large sourire sur sa figure avinée, qui se figea devant les yeux courroucés de sa dulcinée.

 

« Mais tu es ivre ! »

« Moi ! Pas du tout, tiens ! Regarde ! »

 

Et voilà le corniaud qui lève une jambe à la façon d’un héron, d’une manière si stupide que l’assistance le dévisage consternée. Mon amie, morte de honte, me demande de rentrer. Ce que je fais avec plaisir. Après l’avoir reconduite chez elle, je pars me promener à la Grande-Motte. Il fait encore doux en ce bel après-midi de décembre. Les embruns marins viennent chatouiller mes narines. Le ciel est d’un bleu lumineux. On pourrait se croire au printemps. Mais ça et là, de nombreux sapins fleurissent devant les boutiques.

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Soudain, je m’arrête devant un sapin qui scintille de mille feux. Il est couvert de plumes, d’anges et d’oiseaux blancs. Mais la magie de cette contemplation est interrompue soudain. Le père gueule sur son fils. Il n’y a pas d’autres mots pour décrire le flot immonde qui sort de la bouche de l’horrible figure paternelle. Bravo ! Je me dis que décidément tous les Falcoches ne sont pas dénués d’enfants. Je tourne mon regard vers la cacophonie qui a interrompu ma rêverie.

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Et je vois le pauvre gamin, les yeux noyés de larmes, qui regarde l’auteur de ses jours avec désespoir. Comment ce sinistre crétin peut-il imaginer que c’est ainsi qu’on élève un enfant ? Malgré moi, mes pas me rapprochent d’eux. Le père est seul à présent, l’enfant part seul, les épaules voûtées, les yeux vers le sol. Il semble porter toute la misère du monde sur ses frêles épaules. J’ai envie de tordre le cou du sale type. Quand j’arrive à la hauteur du père, il a réintégré le bar où il demande un verre de plus. Le barman regarde l’alcoolique. Ce n’est pas la première fois qu’il lui rend visite. Il n’a pas aimé ce qu’il vient d’entendre. Alors, il demande à l’ivrogne ce qu’il veut manger.

 

« Plus faim, j’ai ! Sers-moi à boire ! »

« Je pense que vous avez assez bu ! »

« M’en fou, sers-moi à boire ! »

 

J’ai laissé le pochard à ses tribulations et je tente de rattraper le gosse qui m’inquiète. Soudain, mon cœur ne bat plus ! L’enfant s’est arrêté au bord de la route et on dirait qu’il attend. Un pressentiment terrible me saisit. Au bord de l’avenue, le gosse semble attendre et je vois soudain une voiture qui arrive à grande vitesse. Bien que je tremble de peur, je me mets à courir. Lorsque j’arrive à la hauteur du môme, je n’ai que le temps de l’enlacer brutalement au moment même où il s’élançait. Je sens son petit corps trembler. Il tourne vers moi, un visage inondé de larmes. Je l’étreins, l’embrasse. Ma peur est encore intacte. Il lève les yeux vers moi et parle doucement :

 

« Je suis nul ! Même pas capable de réussir ma mort ! »

« Petit sot, tu n’es pas nul, tu es un roi ! Ton père est un ivrogne, cela ne fait pas de toi un sale type. »

« Si c’est vrai, le roi est fatigué ! Je n’ai plus la force de me battre contre son addiction. »

« N’y a-t-il personne pour te venir en aide ? »

« Il y a Anna ! »

« Qui est Anna ? »

« C’est ma tante. Anna a des pommes et chaque année, mon père m’envoyait chez elle, pour que je l’aide à la récolte. Mais elle ne veut plus nous voir. »

« Pourquoi ? »

« À cause de ce que mon père a fait à Maurice, son chat. Il l’a jeté par la fenêtre, parce qu’il l’avait griffé. Quand Anna a demandé à mon père s’il n’avait pas vu son animal. Cet idiot lui a dit qu’il avait vu le chat s’envoler. Quand elle a retrouvé la pauvre bête, il souffrait terriblement de plusieurs fractures. Après cela, elle a jeté mon père dehors, en lui disant qu’elle ne voulait plus jamais le revoir. »

« Donne-moi son numéro de téléphone ou son adresse, je dois lui parler. »

Ainsi fut fait. La tante, à la suite de notre rencontre, prit l’enfant chez elle. Je dus aller faire une déclaration au tribunal et le petit homme fut confié à sa tante. Aujourd’hui, le petit Nicolas vit au milieu des pommes, des chats et des délicieuses pâtisseries de sa tante. Il n’a plus envie de mourir

 

Maridan 18/12/2013



22/04/2023
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