atelier du 5/02/2014
L’amande chante à l’oreille du petit écureuil.
Sauvage, le lynx roule dans l’herbe pour nettoyer son poil plein de sang. Il était très gouteux, ce petit écureuil, mais pas assez rapide, pour lui échapper. Il connait un moment de félicité à se rappeler le festin qu’il vient d’accomplir. Reste à espérer que ce ne sera pas le dernier. Plus beaucoup de bêtes dans ces bois qu’on ravage, jour après jour. Mais, allons ! Il garde confiance, ce sera bientôt l’ouverture de la chasse et il va pouvoir suspendre ses traques. Près de l’étang, il est certain de trouver moult canards et autres volatiles qui font le bonheur des chasseurs, mais plus encore le sien. Car il n’a qu’à laisser les chasseurs rentrer chez eux, le soir, pour venir prendre ce qu’ils n’ont pas occis. Dans ces bois où tout se mélange, pense le lynx, il n’y a à craindre que l’homme, et par sa faute la disette.
L’amande chante et le petit écureuil l’entend. Sauvage, le lynx se lave en glissant dans l’herbe afin de lustrer sa si belle peau. Enfin, il est débarrassé du sang. La félicité le gagne. Quel festin, ce petit écureuil, il s’en lèche les babines. Reste à espérer que ce ne sera pas le dernier. Presque plus d’animaux dans cette futaie que ravagent les humains à chaque instant. Mais, il attend, dans quelque temps, il y aura le début de la chasse et il va suspendre ses traques au gibier. Près de l’étang, il sait qu’il y aura des canards, des grives, des huppes cendrées, délicieuses à manger. Bien sûr, il devra attendre que les chasseurs partent chez eux. Mais au final, c’est dans sa panse que le gibier qui aura échappé au massacre finira. Dans sa futaie se mélangent lapins, lièvres, rats et autres espèces, mais si peu ! Il pense à cela le pauvre lynx et se dit que la seule espèce néfaste, en ces lieux, c’est l’être humain.
Le voyage de mes rêves
Je suis partie ce matin avec pour tout bagage, une valise remplie de cahiers vierges et une boite de Bic. Je pars à la recherche d’un coin de terre où planter mes racines d’écrivain. De quoi ai-je vraiment besoin ?
D’énergie pour écrire, de calme pour me retrouver, d’herbe grasse pour planter mes pieds solidement dans la terre. Je suis une plante déracinée. Je ne me sens chez moi, nulle part. Seules la Corrèze et plus encore, la ferme de ma grand-mère m’apportent le plaisir d’être moi.
J’aime promener mes pieds nus dans cette herbe tendre, d’un joli vert printemps. La fenêtre de la chambre ouvre sur la vallée. Face à moi, ce ne sont qu’arbres fruitiers à ma gauche : cerisiers, pommiers, noisetiers. À ma droite de longues rangées de dahlias, de près d’un mètre de hauteur, qui offrent une palette aux couleurs lumineuses et aux fleurs magnifiques. Plus à droite encore le chemin de terre qui conduit au cœur du bois un peu plus loin. Et derrière ce chemin, la pente qui conduit au petit ruisseau qui part à gauche vers le bois ou à droite vers les cascades. J’aime ce lieu comme si de tout temps, il s’était inscrit dans mes gènes. J’aimerais y vieillir, et même m’y éteindre. Je sais que c’est là que mes mots trouveraient un écho, celui de l’univers, celui de la solitude à laquelle j’aspire de plus en plus, celui de la vie.
Le matin, je laisserais partir Vasco et Big dans de jolies balades champêtres. Moi, je partirais cueillir des cèpes et des giroles au pied des chênes et châtaigniers qui les abritent si bien. Je sentirais l’odeur des feuilles mortes qui se décomposent doucement au cœur des bois sombres. Je serais accompagnée par le chant des oiseaux. J’entends déjà le clapotis de l’eau qui caracole autour des cailloux et roches posées ça et là. Alors, je m’approcherais du bord du ruisseau et comme autrefois, quand j’étais enfant, je chercherais les écrevisses, si nombreuses, à cette époque et si rares aujourd’hui. Ils sentaient si bon les bois de mon enfance. Puis, je reprendrais mon chemin et je reviendrais vers la ferme, mettrais de l’eau à chauffer pour le thé, puis quand le thé serait enfin prêt, j’allumerai un grand feu dans le cantou. J’accrocherai la grande marmite avec le diner pour le soir et enfin, je poserais mes pauvres jambes fatiguées sur le banc de bois près du feu. J’aime tant m’assoir ainsi au cœur du cantou, quand la marmite fume et répand la douce odeur de la bonne soupe de légumes.
Je sentirais alors, mon corps se réchauffer lentement à la douceur de l’âtre et du thé qui coule dans ma gorge, réchauffant ainsi tout mon corps. Mes jambes, enfin au repos, se détendraient doucement et j’écouterais, avec ravissement, le crépitement du bois de chêne dans la cheminée. J’observerais la danse des flammes sur les grosses buches et je m’enivrerais de ces instants dignes des plus beaux voyages du monde.
Il n’y a qu’à cet endroit que je me sens vraiment chez moi. C’est pourquoi je comprends si bien ma grand-mère qui y a passé toute sa vie, seule et loin de tous.
La Corrèze est un pays rude, mais c’est une terre où les hommes et les femmes autrefois se moquaient bien du confort dit moderne. Même si hélas, celui-ci a détruit des familles entières de paysans. La terre souffre et là-bas, elle me susurre à l’oreille : reviens, rentre à la maison, c’est là qu’est vraiment ta place. Alors j’attends de gagner au loto pour repartir en ces lieux pleins de magie et d’une énergie qui n’existe nulle part ailleurs pour moi !
Maridan
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