Atelier du 17/03/2015
Paysage au pont - Cornelis Huysmans
Ils s’étaient retrouvés là pour une journée de repos. Des mois qu’ils travaillaient sans relâche. Pour une raison qu’ils ignoraient encore, le marquis les avait chassés du château en leur ordonnant de se rendre à la rivière pour y prendre le bain de l’année.
Il leur avait interdit de revenir avant le coucher du soleil. Bien que tous aient été assez surpris par cet ordre qui avait près d’un semestre d’avance, nul n’avait osé faire la moindre remarque, et tous avaient obéi. Il n’était pas conseillé en cette époque troublée de se fâcher avec son maître.
Eloïse est heureuse de cette parenthèse dans sa vie de dur labeur. Cette jeune lavandière s’est adossée au mur de pierre et profite pleinement de la caresse du soleil sur son pauvre corps épuisé. Son amie Sandra n’a pas résisté au désir de bien faire, et bien que ce jour soit chômé, il a emporté avec elle une panière de linge sale. Les autres filles se moquent d’elle.
- À qui crois-tu faire plaisir en t’acharnant à travailler le seul jour de l’année où tu peux te reposer ? Le maître nous a dit de nous détendre.
- Il n’a pas dit de se reposer, il nous a demandé de nous laver, comme si notre odeur lui était devenue insupportable !
- Vous vous chicanez encore pour des fadaises. Profitez donc du soleil et de l’eau tiède, cela ne va pas durer. Regardez ! Le ciel se couvre et bientôt, il nous faudra trouver un abri pour nous préserver des flots qui vont nous engloutir.
- C’est toujours toi le faiseur de pluie ! Tes parents n’auraient pas dû te nommer Thomas, mais pluvieux. Même que le prêtre a vu son église envahie par les eaux le jour de ton baptême. Tu es vraiment un oiseau de mauvais augure !
À peine, Louis a-t-il prononcé ces derniers mots qu’un rayon de soleil, plus hardi que les autres, vient percer l’opacité des lourds nuages gris qui encombraient l’horizon.
- Regardez ! Le ciel s’éclaircit, Thomas n’est pas un vilain, c’est toi Louis qui dit des niaiseries. Voyez ! On distingue même le château de Monsieur le Marquis. J’espère que le maître se régale. Comme dit la sagesse populaire, quand la chatte n’est pas là, son matou rode !
- Tais-toi malheureux !
Sandra a soudain le souffle court. Elle a eu tort de confier à son amoureux le secret du marquis. Voilà qu’à présent, toute la domesticité est au courant. Son maître la fera battre comme plâtre si cela lui revient aux oreilles. Elle tord son linge avec colère, mais quelle imbécile, elle est seule responsable à présent de ce qui risque de lui arriver ! Elle range le linge dans son panier et tandis que le soleil, après cette brève éclaircie, descend à l’horizon, elle repart courroucée vers le château, elle préfère ne pas trainer.
Maridan 17/03/2015
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