Maridan-Gyres

Maridan-Gyres

ATELIER DU 16 JUIN 2015

Atelier du 16 juin 2015

Ronde de mots

 

L’hiver est là. Ce matin, j’ai observé avec étonnement les premiers flocons.  C’est rare à cette époque. Les feuilles jaunies de l’automne ne sont même pas encore tombées. Mes plantations ne vont pas aimer ce gel précoce.

-          Silène, tu es là ?

Mais où veut-il que je sois ? Comme si je pouvais être ailleurs ! Il a des questions cons parfois… je m’arrête un instant sur mes narcisses recouvertes d’un manteau blanc avant de lui répondre.

-          Oui, dans le petit salon.

Ilva apparaitre sur le seuil comme chaque matin. Il va m’embrasser, me souhaiter une bonne journée et la maison redeviendra silencieuse. C’est étrange comme la solitude grandit dans le silence. Allumer la télé ou la radio, entendre le chant d’un oiseau, même renverser une casserole, remplit l’espace et le temps. Je n’aime pas l’hiver. Les oiseaux semblent aphones, la neige assourdit les sons, tout semble se figer.

-          Bonne journée ma chérie, à ce soir. N’oublie pas notre diner !

Comme si je pouvais l’oublier. Il est obsédé par ce rituel du vendredi soir : les nems, le porc au caramel et les nouilles, le tout en livraison bien sûr ! Ah, oui, et pour finir cette soirée idyllique, les biscuits du destin, cette fameuse légende chinoise ridicule…

-          Je t’aime !

Ces deux syllabes résonnent en moi. Comment peut-il les prononcer ? Je désespère de lui faire comprendre ce que je ressens. Tout cet amour, cette gentillesse, des balles enfoncées en plein cœur, au plus profond de moi. La porte claque juste après le cliquetis du vieux coucou… ou de la chouette ! Je n’ai jamais bien su quel animal était représenté sur cette pendule. Un cadeau de sa mère…

Je délaisse la vue de la fenêtre pour allumer la télé. Je zappe de chaine en chaine. Je connais tous les programmes par cœur, je les ai mémorisés il y a déjà longtemps. Télématin me saoule comme toujours et le journal de la santé... et bien... à part me faire espérer une guérison qui n’arrivera jamais !!! Des larmes se sont mises à rouler sur mes joues. D’un geste rageur, je les essuies et je me dirige vers la cuisine. Un café, j’ai besoin d’un café. Et merde ! La capsule a roulé par terre. Je tente de l’attraper, mais impossible. Je ne peux me lever de ce putain de fauteuil. Putain de corps mort, putain de vie de merde, putain, putain, putain…

Allez reprends toi Silène, ok t’es pas le poète Verlaine, mais quand même !!!!

 

 

Les sensations

 

Il sent le vent sur son visage. Il est frais, une légère brise qui tourbillonne et caresse son cou. L’odeur des pins lui chatouille légèrement le nez. Une inspiration, profonde, fait naitre un délicat parfum. La promenade matinale en forêt, l’humus encore chargé de rosée et l’eau de toilette musquée de son père… trente ans après, l’odeur du souvenir est toujours vivace. Le cri d’une tourterelle le ramène au présent. Son chant le berce quelques secondes avant d’être englouti par les notes de la mélodie. Ah Nabucco ! Ce chœur des esclaves, cet opéra si puissant que chaque note a le gout de la vie. Elles explosent en bouche tels des mets raffinés tantôt suaves, tantôt sucrés, parfois amers ou acidulés, mais toujours un délice d’humanité. Le silence reprend la parole. Il est l’heure, il le sait. Le cercueil de son père le regarde. Ses yeux se ferment sur la mort qui s’entrouvre.

Poème

Pastilles éphémères

De notes sucre-amer

Ou litanie étrange

D’une odeur d’archange

Le son enchanté

D’une vue troublée

Enflamme ma main

D’une caresse de lin

Enfin

L’odeur de groseille

À nul autre pareil

Ce parfum d’émoi

Tutoie l’au-delà

Alex 16/06/2015



16/06/2015
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