Atelier 8 - 2020 - sujet 5
La jeune fille ajusta son voile sur ses longs cheveux blonds. Ses grands yeux tristes la fixaient dans le miroir. Elle était magnifique dans sa longue robe blanche de mariée. Elle s'approcha de la fenêtre et regarda au loin comme si elle attendait quelque chose ou quelqu'un. Puis, mut par un sentiment d'urgence, elle sortit de la somptueuse maison de ses parents. Elle vérifia que personne ne la suivait et s'enfuit en courant vers la forêt de mélèzes.
C'était le printemps, les oiseaux pépiaient gaiement et le bruit du torrent s'amplifiait à chacun de ses pas. Elle jeta ses escarpins immaculés dans un fourré et grimpa résolument en haut d'un rocher escarpé. Elle admira une dernière fois la montagne qui la surplombait avec ses cimes enneigées et elle sauta dans la rivière en crue, sans un cri.
Sa dernière pensée fut pour son bel amant qui l'avait abandonnée à un sort si funeste. Au village, le maire et sa famille s'affairaient aux derniers préparatifs pour le mariage tant attendu de sa fille avec le fils du notaire. Le maire s'enquit de sa fille auprès de son épouse qui s'empressa d'aller la chercher. Ne la trouvant nulle part, ils commencèrent à s'inquiéter lorsque soudain, Germain, le berger, accourut tout affolé. Il n'osa pas leur apprendre la nouvelle et leur demanda de le suivre de toute urgence.
Au pied du ruisseau, leur fille adorée flottait entre deux rochers, son corps ballotté par les remous incessants du tumultueux cours d'eau. La mère sanglotait doucement ne pouvant s'empêcher de penser que sa fille allait attraper froid dans cette eau glacée. Le père, effondré ne bougeait plus. A quelques mètres, un jeune homme dégingandé se maudissait de n'être pas arrivé plus tôt. Malheureusement, son train avait pris du retard à cause des grèves. Il avait promis à sa bien-aimée de l'enlever et de s'enfuir avec elle juste avant la cérémonie. Quel gâchis ! Une jeune bourgeoise et un pauvre mécanicien comme lui n'avaient aucune chance de vivre heureux sans se cacher. Il regarda une dernière fois le corps de la mariée, lui envoya un baiser en pensée et repartit vers la gare, la tête basse, les épaules voûtées, terrassé par tant d'injustice.
Arletta
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