Atelier 5 - 2024 - Sujet 1
Se contempler dans un miroir ou regarder le monde autant lui demander s’il voulait se réincarner en orang-outan. Oscar commençait à l’énerver avec ses péroraisons, s’il savait, il avait d’autres préoccupations, mais il ne fallait rien changer à ses habitudes.
César donc décroche, il écoute la pluie, les gouttes dehors qui ricochent sur le toit de la véranda. Douce mélodie qui l’a toujours apaisée. « Aimer c’est se surpasser », Andrina n’arrêtait pas de dire cela quand il la contrariait.
« Sur la route des vacances, les voitures roulent doucement », décidément Oscar lui tapait sur le système, il s’exhortait tout de même à rester encore un peu avant de partir.
Son téléphone sonnât, quelle bonne aubaine, sa secrétaire le prévenait qu’il avait oublié le dossier Jacquart – un homme de 40 ans qui est soupçonné d’avoir tué sa femme alors qu’elle voulait divorcer - .
- Désolé mec, je vais devoir y aller ? J’ai une audience à peaufiner et j’en ai pour un moment !
- Déjà, tu viens à peine d’arriver. Et je ne t’ai pas raconté mes vacances !
Il finit tant bien que mal à s’en défaire. Il connaît Oscar depuis la fac, tout comme lui, il avait commencé des études de droit mais en « dilettante », riche héritier, il passait plus de temps en soirée et à draguer les filles plutôt que dans les amphis. Il avait finalement tout arrêté pour reprendre les rênes de l’entreprise familiale suite à l’infarctus de son père. Au rythme, où il travaillait et malgré de bons conseillers, l’héritage ne ferait pas long feu !
Ils avaient perduré leur habitude de se retrouver, depuis leurs belles années, une fois par semaine.
César manquait parfois à l’appel quand il avait des plaidoiries à mettre en forme ou quand il allait plaider en dehors de Toulouse.
Il avait rencontré, il y a 3 ans Andrina, jolie brune piquante à souhait qui tout comme lui désirait se réaliser, privilégier sa carrière avant de se poser en couple. Elle était architecte d’intérieur sur Paris, donc déjà du fait de l’éloignement ils ne vivaient pas ensemble, se programmaient de temps en temps des séjours dépaysant au soleil. Il avait envie de fonder une famille, un rêve depuis tout petit, alors même qu’il avait perdu ses parents à 7 ans et qu’il avait été balloté de famille d’accueil en famille d’accueil. Il s’était battu pour en arriver là, enfin il était reconnu !
Andrina l'avait rejoint le week-end dernier, 4 jours passés déjà, dans son petit appartement. Il avait prévu en ce mois de septembre un séjour surprise – ils avaient une semaine devant eux, grasses matinées, ballades, siestes coquines, restaurants… et il avait prévu de la demander en mariage sur le glacier du Mont Blanc. Pour sortir des sentiers battus, il avait choisi un saphir entouré de petits diamants. Elle allait adorer.
Elle allait enfin devenir sa femme ! Et il s’était juré, de toujours la surprendre, de ne pas laisser leur couple s’enliser comme cela arrive si souvent. Recevoir ce bijou déniché chez un antiquaire devrait lui plaire. Il se pliait souvent, quand ils avaient la chance de passer du temps ensemble, à ses désirs, il connaissait ses envies, ses goûts.
Elle était arrivée avec un peu de retard et tendue, mais lui avait répondu qu’elle était en lice pour un projet d’envergure : l’agencement d’une nouvelle chaîne de magasins qui pourrait déboucher sur d’autres contrats. Elle avait tenu à prendre le train et lui avait envoyé un sms à bord du TGV pour lui dire qu’elle le retrouverait directement chez lui, elle avait une course à faire au préalable.
Bien sûr, il s’était interrogé sur cette « course » mystérieuse … Sans être jaloux, il était tout de même piqué par la curiosité… réaction humaine cela dit.
Il l’avait enlacée quand elle était arrivée à l’appartement, après lui avoir demandé si elle avait bon voyage, offert un rafraîchissement, il lui avait préparé un bain – c’était un rituel entre eux – allumé des bougies et laissé tranquille afin qu’elle se délasse.
Un peu plus tard, ils s’étaient rendus dans un petit bistrot sympa connu des «initiés» et l’atmosphère, les plats succulents avaient fini par détendre totalement Andrina. Il se montra particulièrement spirituel en lui contant quelques anecdotes professionnelles.
Comme toute femme coquette, elle s’était absentée pour aller se repoudrer aux toilettes alors qu’ils avaient commandé le dessert et il avait rajouté une bouteille de Dom Pérignon.
Finalement, il avait décidé de glisser dans la coupe la précieuse bague qu’il voulait, au préalable, lui offrir sur la mer de Glace.
Une chanson s’élève au milieu de la nuit, le moment ne peut pas être plus romantique alors qu’elle se rassoit en face de lui.
« Trinquons à nous, à notre amour et à notre semaine de vacances à venir ! Nous les avons bien méritées ! » Lui avait-il dit.
Tous deux avaient levé les coupes et elle avait aperçu la bague, surprise ? Ses yeux s’étaient « froncés » imperceptiblement une fraction de seconde. Comme Oscar était très affuté en tant qu’avocat pour saisir la moindre nuance de changement dans un visage… celui-ci ne lui avait pas échappé.
Elle le remerciât un peu maladroitement et lui expliquât qu’il était peut-être encore un peu tôt pour des fiançailles, qu’ils étaient heureux sans avoir besoin d’en « passer par là », du moins dans l’immédiat.
Compréhensif à souhait, il lui avait répondu qu’ils pourraient en discuter plus tard et que l’important était de profiter pleinement de cette soirée.
Elle se surprit à bailler et il lui proposât de rentrer gentiment à pieds pour flâner un peu... ils ne sont pas loin de chez lui. Elle acquiesçât volontiers à cette proposition et ils franchirent la muraille qui entourait la terrasse privative du restaurant.
A peine dans l’ascenseur, elle se fit plus lourde à son bras et une fois rentrés il l’étendit sur le canapé.
Comment avait-elle pu lui faire ça ????? A lui, qui s’était toujours montré amoureux, respectueux, attentif à ses désirs ?
Il était allé discrètement, en empruntant la vieille Clio de son voisin âgé dont il se servait parfois pour dénicher lui-même des pistes pour préparer ses plaidoiries, interroger des témoins… et s’était rendu devant la gare, un peu en retrait à l’heure où elle devait arriver.
Tout un flot de passagers étaient sortis, il l’avait aperçu elle, au bras d’une jeune femme à l’allure garçonne et elles avaient échangé un long baiser qui avait le mérite de ne pas être équivoque et de donner le ton du lien qui les unissait….
Il avait donc glissé un somnifère dans le champagne – somnifère qui au bout de quelques heures ne serait plus détectable en cas d’autopsie – et il l’avait étouffée... Elle s’était débattue à peine, et il avait pris le corps pour le descendre par l’escalier de service. Escalier où – à l’heure qu’il était – il ne risquait en aucun cas de rencontrer quelqu’un.
Heureusement, le parking ne comportait pas de caméras de surveillance ni de gardien. Il chargeât le corps dans la bâche du coffre de la Clio – qu’il avait garée à sa place en revenant de la gare – et mit le cap dans un bois où il savait connaître des failles profondes.
Une fois de retour chez lui, il tombât à genoux et pu s’adonner au désespoir. Qu’avait-il fait ? Il appellerait la gendarmerie demain pour signaler la disparition de sa fiancée, elle aurait laissé sac, bagages et serait sortie au milieu de la nuit sans qu’il puisse l’expliquer. Il rajouterait qu’ils devaient partir en vacances le matin même et que cette disparition était incompréhensible d’autant qu’il l’avait demandé en mariage et… qu’elle avait acceptée !
Lostris
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