Atelier 20 - 2022 - sujet 4 photo 5
Nous sommes en l’an 4525 après JC. En septembre ou octobre, l’époque des cataclysmes orageux et pluvieux. Mais qu’importe, puisqu’il n’y a plus de saisons, puisqu’il n’y a plus personne pour comptabiliser le temps.
En effet, les derniers humains ont disparu vers les années 3500. Ils n’étaient pas beaux à voir : grands, décharnés, les orbites des yeux enfoncés et noirs, les faciès émincés, errant tels des zombis, n’ayant plus la force de chasser, prêts à se battre à mort pour quelques graminées sauvées de la sécheresse. Ayant perdu le langage, ils communiquaient entre eux par grognements et gestes, tels les babouins que nous voyions dans les zoos au XXe siècle. Libérés, les virus du pergélisol les achevèrent.
Puis les animaux s’étiolèrent jusqu’à leur extinction définitive, faute de nourriture, faute d’eau, faute à la chaleur, le globe terrestre étant devenu une fournaise permanente, balayé par des vents très violents et des typhons gigantesques.
Enfin ce furent les plantes qui disparurent au fur et à mesure du réchauffement climatique. Raréfaction des pluies, souvent devenues des tornades, brèves, violentes et dévastatrices. Assèchement progressif des lacs et rivières. Craquèlement des sols. Destruction des forêts. Liquéfaction irrémédiable des neiges et glaciers.
Bref, cette planète, notre planète, la Terre, est devenue un immense désert, où se côtoient océans et montagnes. Entre eux, c’est un conflit permanent. L’une, menée par son général Everest, fait tout son possible pour ne pas être submergée. L’autre, de par la fonte des glaciers, voit son niveau s’élever graduellement et gagner doucement et inexorablement du terrain.
L’océan y met toutes son énergie, facilitant la formation des typhons, et, avec les années, les rendant plus larges, plus forts, plus violents. Détruisant toute végétation. Erodant les sols sauvagement tout le long de ses côtes. Remontant le lit des fleuves et des rivières, sans qu’aucun obstacle ne puisse les contenir.
Les montagnes se défendent avec l’acharnement du désespoir, mettant en avant leurs sols granitiques pour ralentir l’avancée de leur ennemi. Elles s’arc-boutent de toutes leurs forces à leurs piliers les plus résistants : tels que les chaînes des Alpes et de l’Himalaya, la Cordillère des Andes, le Massif de l’Atlas.
Tels des coups de boutoirs, les tsunamis à répétition se font de plus en plus agressifs et dévastateurs. Progressivement, la surface terrestre diminue et le niveau des eaux monte.
De cette partie d’échec, il ne sortira pas un mat, un vaincu, mais un mort. La force ne suffira pas pour vaincre, la stratégie va être essentielle.
Alors la terre prend une décision sans retour possible, pour sauver sa situation difficile, telle une attaque mettant en péril la reine mais garantissant la victoire par les deux fous. Ce sera la survie ou la mort.
Réunissant toutes les forces intérieures qu’elle possède, chauffant à l’extrême le magma de ses entrailles, compressant les poussées de ses gaz bouillonnant, elle décide, dans un dernier sursaut, de déplacer soudainement et fortement ses plaques tectoniques, afin de rehausser ses crêtes terrestres et enfin dominer définitivement l’océan.
L’Everest pense sa manœuvre imparable. C’est sans compter sur la sournoiserie de son adversaire. Il connait parfaitement cette tactique, puisque ces plaques constituent son propre sous-sol depuis l’éternité. De ce fait, grâce à la puissance de ses courants marins, il immobilise les plaques, créant ainsi une large ouverture au fond abyssal, dans laquelle… plaines, collines et montagnes se trouvent happées inexorablement. Plus aucune arrête terrestre à la surface du globe. Notre astre est devenu une boule d’eau bouillonnante, errant dans l’espace sidéral au gré des différentes attractions planétaires, nous ramenant ainsi 150 millions d’années en arrière.
Echec et mat. Echec et mort.
Le tableau noir de l’école de l’espace vient d’être effacé d’un coup d’éponge. Toutes écritures du passé ont disparu. Le maître de l’univers va pouvoir y écrire la nouvelle histoire de notre planète. Ses élèves, cette fois-ci, retiendront les gestes pour éviter un nouveau réchauffement et limiteront leur consommation à sa production.
Espérons-le.
Décembre 2022.
Dorémi.
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