Maridan-Gyres

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Atelier 18 - 2024 - Sujet 4

 

LMDM 2024-18-4

(28 Décembre 2024)

ASHRAM

Une amie vous offre des vacances dans un ashram en Inde…

Qu’allez-vous en faire ?

 

 

« Trop, c’est beaucoup trop ! Mais il ne fallait pas ! »

 

Devant mes dénégations spontanées, Marie-Caroline m’adressa un fulgurant sourire dont je ne devinais que trop le sens.

 

« Vous ne pouvez pas refuser, Professeur, ça me fait tellement plaisir » dit-elle en plongeant son regard dans le mien.

Votre billet est réservé, vous partez dans trois semaines, une expérience unique que vous me raconterez à votre retour. »

 

Aïe, aïe, aïe, j’étais piégé, ma voisine de cours de yoga m’offrait une semaine de retraite dans un ashram en Inde !

À moi, impénitent cartésien qui ne connaissait de ma vie qu’une seule prière,

celle de François CAVANNA :

« Ô Dieu, que je t’en veux de ne pas exister ! »

Moi qui partage depuis toujours l’aphorisme de Georges BRASSENS :

« Dieu, s’il existe, il exagère. »

 

Alors, inutile de vous écrire que l’idée d’aller m’asseoir les jambes croisées et de joindre les mains en récitant en groupe des mantras en l’honneur d’extravagantes divinités indiennes à multiples bras et têtes d’éléphants, Noooon !!! Définitivement Non.

 

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Le lendemain matin, me dirigeant vers la petite agence « Voyager sans tracas », je me remémorai ce que m’avait dit mon ami indien Raideep :

« Le tourisme spirituel en Inde ? Ne vous y trompez pas, Professeur, c’est avant tout un business, un énorme business pour le pays… »

Et je pénétrais dans la petite boutique.

 

  • Bonjour Sandrine
  • Bonjour Professeur, cela fait plaisir de vous revoir, quel bon vent vous amène aujourd’hui ? Envie de changer d’air ?
  • Euh… Pas tout à fait, je viens pour un échange, enfin si cela vous est possible
  • Pour nos bons clients, nous essayons toujours de faire les choses au mieux.
  • Alors voilà, c’est au sujet de la semaine de retraite en ashram que vous proposez à RISHIKESH que l’on m’a offert…

 

Cela vaut parfois le coup d’être fidèle client, Sandrine accepta facilement l’échange que je lui demandais et je repartis le cœur léger vers mon foyer en me demandant quel discours j’allais bien pouvoir tenir dans un mois auprès de Marie-Caroline…

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Home, sweet home

 

La semaine en ashram, je l’ai intégralement passée chez moi, seul dans mon bateau-livre.
J’y ai lu deux gros pavés, « L’équilibre du monde » de Rohinton MISTRY, grand roman de l’Inde contemporaine, et « Shantaram » de Grégory David ROBERTS, incroyable récit d’une histoire vraie, immersion d’un repris de justice australien dans les bas-fonds et la pègre de MUMBAI, formidable parcours initiatique.

J’évitais absolument de sortir de chez moi, laissant les volets clos au cas où, et je surfais sur le net en dévorant les blogs des touristes racontant leur expérience en ashram.

Je me faisais livrer par le restaurateur indien du quartier des poulets biryani, tandoori, tikka masala, des currys de toutes sortes, des samossas, des naans, des plats végétariens remplis de lentilles corail.

Je regardais le soir des films musicaux de Bollywood sur NETFLIX.
Au bout de huit jours, j’étais devenu incollable sur tout ce qui concerne le sous- continent indien.

 

Et mon portable se mit à sonner :

 

  • Bonjour Professeur, vous êtes bien rentré de RISHIKESH ?
  • Bonjour Marie-Caroline, oui bien rentré depuis hier soir.
  • Vous devez être fatigué
  • Oui, un peu, le décalage horaire, et puis toutes ces émotions…
  • Parfait, Professeur, je viens chez vous ce soir à 18 heures avec l’apéritif, vous me raconterez tout, j’ai grand-hâte d’entendre vos impressions.

 

En raccrochant, je venais de comprendre que je n’allais pas m’en sortir aussi facilement…

 

Quand Marie-Caroline sonna à ma porte à dix-huit heures sonnantes, j’avais positionné deux grosses valises dans l’entrée.

Je l’accueillis en peignoir, avec une barbe de huit jours, et un grand sourire aux lèvres qu’elle ne manqua pas de me retourner.

Tout se présentait au mieux.

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  • Alors, Professeur, cet ashram ?
  • Extraordinaire, Marie-Caroline, même mieux que ça
  • Ah ? Racontez-moi, Professeur, j’en meurs d’envie
  • Oui, bien sûr, mais permettez-moi tout d’abord de vous remercier en vous offrant à mon tour un modeste présent, et à cet instant je tendis à la gente dame une enveloppe à l’en-tête de « Voyager sans tracas ».
  • Une semaine sur les traces de Bouddha au Népal ! mais c’est trop, Professeur, il ne fallait pas…
  • C’est la moindre des choses après le merveilleux cadeau que vous m’avez fait, Marie-Caroline
  • À ce point ?
  • Oui, et même plus que je ne pouvais l’espérer, j’ai atteint le nirvana !
  • Le nirvana, rien que ça ?
  • Oui, il est dans ma chambre, elle s’appelle Karishma, elle est indienne bien sûr, et elle réussit à me redonner mes vingt ans !

 

§

 

Je n’ai jamais revu Marie-Caroline, et nul ne l’a jamais plus rencontrée aux cours de yoga.

Hier, en passant devant l’agence de voyages, Sandrine est sortie de son bureau en me hélant :

 

  • Professeur ! Professeur !
  • Qu’y-a-t-il Sandrine ?
  • Vous savez, cette dame qui vous avait offert la retraite dans un ashram indien…
  • Oui, oui, je me souviens
  • Elle est revenue peu de temps après vous, et vous savez ce qu’elle a exigé ? d’échanger à nouveau son voyage au Népal contre un autre.
  • Et vous avez accepté ?
  • Elle était tellement énervée que je n’ai pu faire autrement.
  • Alors ? Qu’a-t-elle choisi ?
  • « NEW YORK by night, la découverte des nuits underground et déjantées de la Grosse Pomme ! » 

 

JeanBat



16/01/2025
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