Atelier 12 - 2023 - Sujet 7
Il était une fois, une vilaine sorcière qui avait été éconduite par son amoureux alors qu’elle était jeune et belle. Par esprit de vengeance elle prit l’amour en grippe, et son dévolu se porta sur une belle jeune fille pour lui jeter un sort : la belle serait transformée en grenouille dès qu’elle tomberait amoureuse.
Et voilà ! Ce fut fait !
Une jeune fille rencontra un fort beau garçon et tomba amoureuse. A peine leurs échanges consentis, elle s’évanouit dans nature et se mit à croasser ! La sorcière, auteure de cette transformation, s’ empara du batracien et l’emmena tout au fond d’un bois, dans sa trèèèèsss petite maison entourée de champignons bleus, verts, roses, jaunes et mouchetés violets derrière la mare qui lui servait de pas de porte.
A proximité de cette bicoque les arbres autrefois rois de la forêt, angoissés par ses portes bizarres, ses fenêtres tordues et son allure répulsive, resserraient leurs branches autour de leur tronc rugueux, tremblant de frayeur, et telles des larmes de désespoir, leurs feuilles se détachaient et tombaient dans la mare.
Une atmosphère trèèèès étrange planait sur cette clairière. Un silence pesant formait une chape lourde et immobilisait le tableau.
Le toit couvert de guimauve à la lavande dégoulinait sous la moiteur de l’été naissant.
Devant la maison, un champignon-lampe éclairait l’entrée, si peu engageante.
L’accès à la maison se faisait par un escalier de planches à demi-pourries.
Mais qui pouvait avoir envie d’entrer dans cette propriété ?
Une grenouille verte tachetée de points roses, que l’on apercevait très rarement derrière la fenêtre de droite, semblait triste et malheureuse.
Devant sa cheminée, la vieille sorcière remuait dans un gros chaudron de cuivre rouge une potion qu’elle voulait magique, ou plutôt maléfique.
Elle veillait à ce que personne ne pénètre sur son domaine, mais c’était sans compter sur le jeune amoureux qui recherchait toujours sa belle.
Lui, il avait marché des jours et des jours, fouillant plaines et bosquets, landes et forets, sous-bois et clairières, jusqu’à ce jour où, épuisé et assoiffé, ses pas le conduisirent vers la trèèèèsss petite maison. Devant ce tableau surnaturel, le jeune homme s’agenouilla, trempa ses lèvres dans l’eau, but une grande gorgée et s’endormit profondément en bousculant fortement le bord de l’escalier branlant.
Sous la chute du jeune homme, l’escalier gémit et emplit le silence du lieu d’une plainte lugubre. Lâchant sa grande cuillère en bois la sorcière ouvrit la porte et jeta un œil inquisiteur aux alentours. La reinette en profita pour se faufiler dehors et plongea dans la mare à l’insu de sa geôlière.
Ne voyant rien, la sorcière reprit son poste d’apothicaire sans se rendre compte de la disparition de sa prisonnière.
La grenouille aux membres endoloris par de longs jours de captivité, nagea doucement en direction du bel endormi. Arrivée à sa hauteur elle bondit sur sa poitrine. Posant les pattes sur ses yeux, elle se mit à croasser faiblement.
La fatigue du jeune homme s’envola comme par magie et il ouvrit ses yeux, éberlué par le spectacle qui s’offrait à lui. Prenant le petit batracien au creux de sa main il lui confia son chagrin et le sera contre son cœur.
La vieille sorcière, dont la soupe maléfique était terminée, s’aperçut alors de la disparition de la reinette. En se précipitant, elle perdit l’équilibre et tomba dans son chaudron.
Morte.
Le supplice de la reinette était terminé. Rapidement elle reprit son aspect humain, plus belle que jamais, blottie dans les bras du jeune homme. Elle allait retrouver sa liberté et son droit d’aimer son amoureux, et lui donner sa main puisque ses pattes palmées avaient disparu.
Dans la canopée les oiseaux silencieux jusqu’alors reprirent leur chant mélodieux.
Heureux, les arbres se réjouirent de voir le jeune couple.
La sève des arbres se remit à circuler avec vigueur, et de jeunes feuilles naquirent et se déployèrent le long de leurs branches dégourdies.
La guimauve de la petite maison fondit soudainement laissant place à un beau toit de chaume, les fenêtres s’illuminèrent et la carcasse de la très vieille petite maison reprit une allure tout à fait sympathique. Les marches de bois pourri firent place à de beaux escaliers de hêtre, et les champignons laissèrent place à une mousse abondante et généreuse.
La vieille sorcière avait disparu et la vie avait repris ses droits.
Une fée passant par la remit aux jeunes gens les clés de cette belle chaumière qu’une marre d’eau fraîche entourait avec bienveillance.
Et c’est ainsi qu’ils furent trèèèèès heureux dans ce coin devenu merveilleux.
Shunt 2023.08.16
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