Atelier 12 - 2018 1er sujet
Le monde est pavé de bonnes intentions. Alors pourquoi les hommes passent-ils leur temps dans des récriminations sans fin ? Quand cesseront-ils de larmoyer sur leurs soucis sans jamais tourner les yeux vers le tiers monde où des êtres meurent chaque jour dans l’indifférence générale.
La semaine dernière, j’étais parti déjeuner au restaurant. En fin de repas, j’ai entendu une femme vociférer parce que le menu ne prévoyait pas de fromage en fin de repas. Pour qui ignorait de quoi il s’agissait, à entendre ses hurlements, on pouvait penser qu’on avait égorgé son fils, tué son mari ou assassiné sa mère. Affolé à l’idée que cette hystérique puisse poursuivre sa grande scène des lamentations, je me suis levé et approché d’elle.
- Chère madame, vous me voyez consterné par le drame qui vous touche. Hier encore je faisais un reportage en Syrie ou des enfants avaient été gazés. Deux jours plus tôt j’assistais impuissant à la famine qui sévit au Yémen et qui tue chaque jour des familles entières et dix jours plus tôt c’est en Somalie que j’ai vu s’éteindre des enfants qui n’étaient plus que des cadavres ambulants. C’est vrai que jouxter ces misères lointaines à votre manque de fromage peut paraître dérisoire, mais que voulez-vous, pour une fois que je m’autorise une sortie en famille, j’avoue avoir beaucoup de mal à supporter vos vagissements compulsifs. Alors que toutes ses mères éplorées n’ont pas émis la moindre plainte devant les corps suppliciés de leurs enfants.
Lorsque je regagnais ma place assez satisfait d’avoir muselé la mégère, j’entendis la péronnelle qui disait :
- Aujourd’hui, en France, on ne peut plus rien dire sans qu’un « bienpensant » se sente obliger de la ramener. C’est comme pour les politiques et leurs complots. Chacun y va de ses petites affaires sordides et c’est nous qui trinquons.
Ma femme me donna un coup de pied sous la table, mais la colère me prit à mon tour.
- Chère madame, vous dire que ma patience est à bout serait un leurre. Mais à vous écouter hurler vos états d’âme sans saveur, je suis pris d’une grande fatigue qui je le crains ne finisse par me faire réagir de manière violente.
Heureusement, je n’eus pas à le faire, car le restaurateur, fatigué par le comportement de cette cliente avait fini par alerter les ilôtiers qui demandèrent à l’indélicate de quitter les lieux dont elle troublait la quiétude. Le patron avait demandé à la police de chasser l’indésirable. La voir expulsée du lieu où j’avais l’habitude de déjeuner me procura un vif plaisir. La dame était bien connue des services de police, car elle était coutumière de ce fait. Souvent après l’esclandre, les patrons la laissaient partir sans payer. Malheureusement, cette fois, elle était tombée sur un os.
Nous avons terminé notre repas dans le silence et avec le champagne offert par le patron.
Maridan 21/07/2018
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