Maridan-Gyres

Cristina est serveuse dans un bar, alors qu'elle a une licence, qu'elle finit une thèse et qu'elle est trilingue : nymphomane affamée de tendresse, elle croque les hommes et avale de l'ecstasy avec la boulimie du désespoir. Rosa, trente ans, est directrice financière : elle a fait des études brillantes en philologie anglaise, quitte le boulot à 22h00, vit en solitaire dans un appartement immense, s'habille en vêtements de marque, impeccables, discrets et sur mesure, ne connaît ni le solde de son compte courant ni le nombre de ses subalternes, et elle se drogue au Prozac. Ana est sans profession : elle se cantonne dans un rôle de mère de famille rangée, nageant dans un perpétuel mal-être, véritable zombie cathodique, accroc aux comprimés.

Il semble que ma lecture ait suivi ce que je pense être la courbe d'effet d'une drogue sur l'organisme, bien que je n'en ai jamais pris.

En matière de drogue, j'en suis resté à Flash de Duchaussois et encore, je n'en ai que des souvenirs flous.

Les premiers chapitres de la main de Cristina correspondraient au « flash » ; le style, le choix des mots crus, les tournures et l'autodérision qui y sont contenus m'ont rapidement fait grimper au firmament, paradis qui n'a rien d'artificiel.

Et puis, un peu comme un soufflet qui s'affaisse doucement, je suis tombé en empathie avec les sœurs Gaena dont le récit de la vie a fini par me faire toucher une sorte d'état dépressif « post-prise de dope ».

Les quelques piqûres de rappel de Cristina, qui n'avaient pas la même verve, n'ont pu me faire revenir à l'extase fulgurante du début.

Et maintenant que la dernière page a été tournée, je sens un vide : serai-je en état de manque ? Manque qui se manifeste par le besoin de savoir ce qu'il est advenu de ces trois vies coincées entre la révolte féministe et le matriarcat (Lillith!)

À relire.

Pour le plaisir du flash !

Bernard 4/02/2015